« Il y aura une vraie problématique autour de l’épargne des ménages »
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- Véronique Riches-Flores
- Économiste indépendante
- RF Research
Enfin, l’économiste nous livre ses conseils en matière d’investissement.
Interview achevée de rédiger le 20 mai 2020
Les gouvernements ont ensuite adopté des mesures de soutien aux acteurs économiques. Le but : sauver le maximum d’entreprises en leur permettant de traverser cette période difficile (allégement ou report de leurs charges, financement de la mise au chômage partiel des salariés…). Ce qui est assez intelligent. C’est la première fois qu’une telle politique est adoptée au niveau européen, sur le modèle allemand de 2009. Le principe : sauver l’emploi des entreprises pour leur permettre de repartir une fois la crise passée en évitant que le choc dégénère en une flambée du chômage aux effets durablement néfastes.
À ce jour, nous ne sommes pas encore à la mise en place d’un plan de relance. Les gouvernements gèrent l’urgence, à savoir : la crise sanitaire, le sauvetage des entreprises et la réduction du coût social avec des aides pour les ménages.
Ces dispositifs ont été mis en place dans la plupart des pays, sauf aux États-Unis. Les Américains sont restés dans la logique de leur modèle traditionnel, reconnu pour sa flexibilité. Ce système va peut-être poser question au moment de la reprise parce que les entreprises américaines n’ont pas eu ce choix de pouvoir maintenir leur force de travail en place et ont donc procédé à des licenciements massifs. Rappelons que l’économie américaine a détruit, entre mars et avril, autant d’emplois qu’elle en avait créés depuis 2009.
Au final, il y a encore beaucoup d’incertitudes sur le point bas conjoncturel. La dégradation économique a été profonde et supérieure à bien des anticipations des économistes.
À plus long terme, le scénario d’inflation se fera sur l’appréciation du choc d’offre et de demande. Tant qu’il n’y a pas de politique de relance digne de ce nom, susceptible de transformer les liquidités injectées par les banques centrales en hausses de salaires, le retour de l’inflation semble peu probable.
Il y aura donc une vraie problématique autour de l’épargne des ménages. Elle a considérablement augmenté durant le confinement et il faudrait qu’elle puisse être mobilisée pour servir efficacement à la reprise. C’est l’un des défis majeurs des politiques économiques qui seront menées dans les prochains mois que d’être suffisamment claires et ambitieuses pour rassurer les ménages et permettre de retrouver des comportements d’épargne plus favorables à la croissance de la demande.
En Bourse, les utilities (entreprises de services aux collectivités comme l’eau et l’électricité) offrent sans doute de meilleures perspectives structurelles que les industrielles mais ces secteurs restent chers quoi qu’il en soit. Je recommande donc la prudence à court terme.
(1) «There Is No Alternative » phénomène qui pousse les investisseurs vers les actions car l’obligataire rapporte peu compte tenu du contexte de taux bas. En d’autres termes, « il n’y a pas d’autres alternatives » que les actions.
Mis à jour le 12/06/2020