Macron ne veut plus du prélèvement à la source en 2018

Le nouveau président envisage de décaler la mise en place du prélèvement à la source, pourtant voté sous le quinquennat de François Hollande. Quelles sont les conséquences pour le contribuable ? Et ce sursis est-il surtout possible ? Assurancevie.com fait le point.

Le prélèvement à la source c’est comme un roman feuilleton, avec son lot de rebondissements et de surprises !
Il a été voté sous la présidence de François Hollande pour entrer en vigueur le 1er janvier 2018… Mais Emmanuel Macron, fraîchement élu, avait fait part de sa volonté de reporter cette révolution fiscale pour « *s’assurer de la charge que cela pourra représenter pour les chefs d’entreprise* » tout en se souciant de « *l’impact psychologique* » d’une telle mesure sur les contribuables qui verraient leurs salaires diminuer sur le bulletin de paie.
Mais rappelez-vous, quelques heures avant sa démission, le gouvernement sortant avait publié des décrets d’application autour de ce prélèvement à la source ! Leur mise en application débutant à l’automne, on pouvait alors se demander si Emmanuel Macron et son équipe aurait le temps et surtout la possibilité de revenir effectivement sur cette mesure.
Qu’à cela ne tienne !
Début juin, le nouveau gouvernement a riposté : le lancement officiel du prélèvement à la source sera repoussé au 1er janvier 2019.

Les avantages du prélèvement à la source…

Pourquoi le prélèvement à la source crée-t-il autant de remue-ménage ? Car sur le papier, cette réforme fiscale qui consiste à ne plus avoir de décalage d’un an entre la perception des revenus et le paiement de l'impôt afférent à ces revenus a de bons côtés (qu’il convient de souligner) :
- Elle permet d’éviter les problèmes de trésorerie si jamais le contribuable rencontre un événement personnel (divorce, décès) ou professionnel (retraite, augmentation du salaire, perte de salaire) influant sur le montant de ses revenus. Ainsi, aujourd’hui dans ces cas de figure, le contribuable peut payer beaucoup d’impôt sur l’année précédente alors qu’il connaît une forte baisse de ressources. Bien sûr, le changement de situation peut être voulu et/ou prévisible, mais dans d’autres cas, il peut être complètement subi (ex : licenciement…) entraînant des difficultés financières. Le prélèvement à la source souhaite mettre un terme à tous ces problèmes en faisant en sorte que l’impôt soit prélevé en même temps que les revenus seront perçus. L’impôt s’adaptera ainsi aux changements familiaux et professionnels au moment où ils se produiront. Du fait de cet ajustement rapide de l’impôt, le prélèvement à la source se distingue de la simple mensualisation de l’impôt qui est aujourd’hui applicable.
- Elle permet d’avoir un impôt qui est mieux réparti dans l’année. Exit le tiers provisionnel en février et mai avec un solde en septembre ou bien encore la mensualisation sur 10 mois. Pour les salariés qui perçoivent un salaire mensuel, l’impôt sera étalé sur 12 mois. De même pour les indépendants, l’impôt sera payé sur 12 mois.

Un certain nombre de questions

Mais le prélèvement suscite dans le même temps de nombreuses incertitudes et d’importantes réactions contestataires de la part, notamment, du patronat. N'a-t-on pas créé une véritable machine à gaz ?
Les entreprises sont-elles prêtes à collecter l'impôt ? Vont-elles pouvoir s'adapter face aux nombreux changements qui influent sur le montant de l'impôt ? Et quel va être le coût pour les entreprises d’une mise en application (nouveau logiciel de gestion de paie, embauche du personnel…) ?
Du côté des particuliers, on s’inquiète aussi, surtout au niveau de la confidentialité des données personnelles et fiscales qui seront entre les mains de l’employeur…

Pour toutes ces raisons, Emmanuel Macron et ses ministres veulent s'assurer de la robustesse du projet et bien mesurer ses conséquences. D’où le report d’un an. Mais ils ont aussi précisé qu’un audit sera effectué cet été sur un échantillon d'entreprises. Et qu’une décision sera prise suite à ce test (confirmation du report ? Retrait pur et simple de la réforme ?...).

Pour d’autres politiques, le gouvernement a d’autres motivations en tête. Ce sursis d’un an interviendrait plutôt pour rendre plus visible la baisse des cotisations programmée par Emmanuel Macron qui est censée gonfler le salaire net, et ce dès l’année prochaine…

Report or not report ?

Si la mise en place du prélèvement à la source est bel et bien décalée d’un an, 2017 ne sera plus considérée d’un point de vue fiscal comme une année de transition. Autrement dit, 2017 ne sera plus une année blanche.

Cela signifie que les outils de défiscalisation pourraient être utilisés pour alléger la facture fiscale. Par exemple les versements effectués sur votre PERP en 2017 pourraient diminuer votre revenu imposable. C’est une bonne nouvelle, n’est-ce pas ?

Mais avant de se réjouir, il faut que le report soit acté. Et cela ne semble pas une mince affaire…

Christian Eckert, l’ancien ministre du budget, qui a porté à bout de bras le prélèvement à la source, ne cache pas son amertume. Voici ce qu’il a écrit sur son blog : « *En matière d’impôts, notre Constitution précise que l’assiette, les modalités de calcul et de recouvrement relèvent du Parlement et de lui seul. En la matière, la loi prévoit sa mise en œuvre au 1er janvier 2018 et seul le Parlement, pas encore élu, pourra changer cette date dans une loi de finances* ».
Ainsi, la solution juridique la plus appropriée est de voter le report cet été dans le cadre d’une loi de finances rectificatives. Il ne faudra donc pas tarder, et avoir une majorité parlementaire.

Mais, pour certains politiques et avocats fiscalistes, ce report pourrait être retoqué par le Conseil Constitutionnel…en vertu du principe de « l’espérance légitime » des contribuables. En d’autres termes, des contribuables qui avaient en tête la date initiale d’application du prélèvement à la source ont pu faire des choix professionnels et financiers cette année, qui ne seraient plus bénéfiques en cas de report… Le roman feuilleton n’est donc pas terminé !

Mis à jour le 21/03/2022

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